Le « haut français » du Bas-Canada

Fanfreluche nous écrit un conte.

Les anciennes séries à Radio-Canada, dont « Fanfreluche » (1968), privilégiaient un accent français « international ». (Société Radio-Canada / Youtube)

Le français canadien est souvent stéréotypé à tort comme une langue de bucherons, bourrée de sacres. En réalité, elle comporte plusieurs niveaux stylistiques avec des différences marquées quant à l’accent.

Mon ami parisien a ri de toutes ses dents quand j’ai employé le terme « français international ».

« Mais le français, c’est déjà une langue internationale », m’a-t-il dit.

Le français « international »

Au Canada, ce terme désigne un français standard, « neutre, sans accent ». Il ressemble nettement aux variétés européennes en phonologie (prononciation) et en morphosyntaxe (grammaire). On l’entend surtout dans les voix hors champ (voix off) à la télévision et dans les émissions pour enfants, qu’elles soient doublées ou produites ici.

C’est la variété qu’on retrouve dans l’écriture et celle enseignée aux apprenants du français partout au Canada.

« Prochaine station… Snowdon ! » La voix du métro montréalais, Michèle Deslauriers, emploie un français international.
Le journaliste Charles Tisseyre prête sa voix et sa diction impeccable à plusieurs documentaires diffusés à Radio-Canada.

Le français québécois spontané

Dans les interactions orales plus « naturelles » et « spontanées », on peut entendre une gamme de variétés du français québécois, dont certaines plus soignées et d’autres plus familières.

Une entrevue avec Alexandre Boulerice, chef adjoint du Nouveau parti démocratique au Canada. Un français québécois plus soigné.
Bande-annonce pour Mommy (2014), film de Xavier Dolan. Un français québécois extrêmement familier (le joual).

La diglossie

Ce phénomène porte le nom de diglossie : quand deux variétés, « haute » et « basse », coexistent dans une communauté. Le choix de la variété dépend du contexte et du public ciblé, tel que décrit ci-dessus.

Le français international serait donc la variété « prestigieuse » par rapport au français québécois oral. Le français est ainsi une langue à plusieurs « niveaux ».

En revanche, l’anglais canadien est relativement homogène si on fait abstraction d’accents provenant « d’ailleurs ». À Toronto, mes enseignants, mes élèves, les politiciens et les voix hors champ partagent à peu près le même accent.

Le parler de la classe moyenne anglophone est uniforme « de Halifax à Victoria », selon Henry Rogers, ancien professeur en linguistique à l’Université de Toronto.1Rogers, Henry. (2000). The Sounds of Language: An Introduction to Phonetics. New York: Longman. (p. 123)

Un phénomène commun

La diglossie n‘est pas rare du tout dans les langues du monde. L’arabe comporte plusieurs dialectes locaux. Certains ne sont pas mutuellement intelligibles entre eux : un Égyptien risque de ne pas pouvoir comprendre un Marocain.

Un arabe plus normatif, l’arabe standard moderne (فصحى, fuS-Ha), est employé dans les textes religieux et les cours universitaires, ainsi que dans les médias pour enfants. Les films de Disney sont désormais doublés en fuS-Ha, une décision fort contestée par le public arabophone.

Élargissons la discussion

Découvrez quelques différences entre les accents québécois et international.

Si vous êtes locuteur natif ou apprenant d’une langue autre que l’anglais ou le français, la diglossie existe-t-elle dans votre langue aussi ?

Quelles sont les différences entre les « niveaux » de votre langue ?

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